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Nous avons déjà évoqué le sujet de la prospection en BtoB au travers d’un billet sur le cold calling et des chiffres assez alarmants nous avaient été communiqués par Jean-François Messier quant à l’efficacité des méthodes utilisées par le terrain. Jennifer Kempe avait rebondi sur un de nos échanges LinkedIn sur ce sujet de la prospection téléphonique et son calcul des 200 « levées de coude », c’est-à-dire le nombre d’appels téléphoniques qu’un commercial doit passer, pour réussir à parler à un client potentiel. Je l’ai donc interviewée et elle m’a mis sur la piste d’un concept que je ne connaissais pas, l’intelligence sociale, adaptation française du vocable “social intelligence”. Notons que Jennifer dirige l’agence FPC, spécialisée en développement commercial à Rouen, et enseigne également depuis 15 ans à l’ISD Flaubert, une école de commerce publique à Rouen également, qui forme à un master de management du développement commercial (*).
Prospection téléphonique en BtoB : utiliser l’intelligence sociale sans modération

Prospection BtoB et intelligence sociale
L’intelligence sociale est le fait d’être conscient des autres et capable de décoder avec précision les indices verbaux, non verbaux et contextuels. Comprendre qu’il faut être disponible pour les autres afin de communiquer efficacement est essentiel pour établir un rapport et la confiance
Geeva Samynathan
Jennifer a apporté pas mal de nuances dans les discussions précédentes sur la prospection téléphonique en BtoB et notamment sur la nécessité de “lever le coude” des centaines de fois pour obtenir un simple rendez-vous. Après tout, c’est une moyenne, et donc cela ne veut pas dire grand chose comme toutes les moyennes. Par ailleurs, ce n’est pas parce qu’une majorité de moutons répète les mêmes gestes et les mêmes erreurs qu’il faut les suivre.

Des méthodes existent pour bien prospecter par téléphone en BtoB
Elle estimait dans cet échange que, sans nier la difficulté que rencontrent la plupart des commerciaux en prospection, des méthodes existent pour rendre la prospection B2B plus efficace. Pour elle, ce chiffre de levées de coudes nécessaires peut en effet tomber à 10 (à nuancer bien sûr selon les prospects ciblés) à condition de respecter sa méthode. J’ai voulu en savoir plus sur son approche.
Quoi ? Des centaines d’appels pour bien prospecter ?!
Jennifer et son équipe font de la prospection téléphonique tous les jours, et estiment ne pas avoir besoin de passer autant d’appels que ce que nous indique le calcul de Jean-François Messier pour essayer d’obtenir un rendez-vous. L’approche est extrêmement importante, évidemment.
Sa méthode s’oppose aux méthodes « d’abattage» qui consistent à taper dans le dur sans s’être un tant soit peu renseigné sur le prospect avant de l’appeler. Par contre, cela n’enlève rien au fait que le télémarketing soit très chronophage, qu’il nécessite beaucoup d’assiduité.”C’est un travail de fond, de fourmi, qui nécessite de ne rien lâcher”, souligne Jennifer.
Se renseigner sur son client avant de l’appeler peut sembler une évidence. Alors, pourquoi tant de commerciaux tapent-ils dans le dur sans se préoccuper de savoir qui est le prospect qu’ils appellent ?
4 à 6 contacts argumentés de l’heure suffisent
En BtoB, Jennifer estime que joindre un interlocuteur nécessite environ 4 à 6 contacts argumentés de l’heure. Un contact argumenté signifie échanger avec une personne pour puiser de l’information. Il est parfois possible que cela aboutisse à un rendez-vous, mais ce n’est pas forcément l’objectif initial. Cela dépend bien sûr de la cible. « Il y a des campagnes où vous obtiendrez 5% de rendez-vous, et c’est très bien, compte tenu de la cible. D’autres où vous en obtiendrez 15% », souligne-t-elle.
Bien souvent, le but de l’appel de prospection téléphonique n’est pas de faire une vente, mais de prendre rendez-vous. L‘approche de Jennifer permet de prendre un rendez-vous avec quelqu’un qu’on ne connaît pas, et qui a priori n’a pas de besoins immédiats.
Prospection BtoB : d’abord se renseigner
Avant d’aller chercher le rendez-vous, le commercial en prospection téléphonique doit chercher à obtenir quelques informations en amont de l’appel pour savoir à qui il a affaire, sur quoi la personne réagit, etc. Cela va contribuer à briser la glace pour initier le contact téléphonique, en reprenant par exemple une publication partagée par la personne, ou une réaction à une publication.
Or, bien souvent, le commercial reste sur son objectif qui est de prendre un rendez-vous, et ne va pas comprendre que son interlocuteur refuse, car à ses yeux, son produit est vraiment le meilleur. Il a donc du mal à s’imaginer que le prospect ne soit pas émerveillé par ledit produit et cela crée une déception immense chez le vendeur.
Pourtant, ce n’est pas si difficile, c’est un peu toujours la même histoire, il faut s’intéresser aux autres. Encore une évidence, alors pourquoi tant de commerciaux ont-ils du mal avec cela ?
Avant toute chose, il faut s’intéresser aux autres et arrêter de faire une fixation sur son produit
Il y a juste besoin d’un premier échange, suivi par un envoi de documentation, pour ensuite reprendre contact un peu plus tard. “Et là, ce sera différent parce qu’entre temps, le commercial aura pris de l’information sur son prospect” nous explique Jennifer. C’est ce qui fait toute la différence.
Quand nous recevons nous-mêmes des appels, nous n’avons pas envie que la personne nous dise que son produit ou service est le plus beau, le plus fort, nous avons envie que la personne s’intéresse à nous et de constater que nous n’avons pas été choisis au hasard.
Jennifer Kempe base sa méthode sur 3 règles fondamentales qu’il vous faudra bien maîtriser si vous désirez progresser dans l’efficacité de votre prospection BtoB.
Règle n°1 en prospection téléphonique Bto2B : créer du lien
« La première règle est donc de se renseigner sur la personne qu’on va appeler. C’est important, aussi pour l’image du vendeur et se sa société. Car si nous appelons quelqu’un qui n’est pas concerné, cela donne une mauvaise image de celui qui appelle », souligne-t-elle.
Il est important de clarifier que l’objectif de l’appel est en premier lieu de créer du lien avec ses interlocuteurs. Pour se différencier et marquer les esprits, il faut avoir discuté avec la personne, avoir échangé avec elle.
Règle n°2 en prospection téléphonique : recueillir un maximum d’informations
L’objectif de l’appel de prospection n’est pas de parler de soi, mais de faire parler le client. C’est la base du marketing. Plus nous en saurons sur lui, plus nous pourrons lui vendre ce dont il a besoin.
Il faut donc lui poser des questions et recueillir un maximum d’informations sur ce qu’il fait, comment il travaille, avec qui, etc. Il pourra ainsi nous dire quels sont ses besoins, ses projets.
Une bonne astuce, notamment en vente complexe, est de se préoccuper de votre interlocuteur en lui montrant que vous êtes à l’écoute des “problèmes qui l’empêchent de dormir la nuit”.
C’est la phrase magique, sortie de la méthode solution selling qui fait mouche la plupart du temps. Les clients — j’ai été de l’autre côté de la barrière pendant 15 ans — sont obsédés par leurs problèmes et non par vos solutions. Demandez leur ce qui les empêche de dormir la nuit et vous serez surpris du résultat car ils adorent — en règle générale — expliquer leurs difficultés car peu nombreux sont les commerciaux qui sont prêts à les aider. Alors mettez-vous à sa place : quand vous en trouvez un …
Règle n°3 en prospection téléphonique : se préparer mentalement
Jennifer conseille enfin de se préparer à la prospection téléphonique, en sachant que la journée sera un peu pénible parfois, qu’il y aura sans doute des interlocuteurs pas toujours sympathiques, qui ne voudront pas nous parler, qui ne seront pas les bonnes personnes, etc. Mais il y aura aussi de belles rencontres, de beaux échanges, et des choses intéressantes. Il faut y être préparé, et ne pas se décourager à chaque fois qu’on sera confronté à un refus.
Le script d’appel sera très utile, pour servir de fil conducteur sur ce que nous avons à dire, à demander, comment se présenter, ce que la personne doit entendre, les informations que nous cherchons à obtenir.
Il ne s’agit pas de lire « bêtement » un script nous explique-t-elle, mais plutôt de pouvoir y revenir si notre interlocuteur nous déstabilise à un moment donné.
L’importance de l’intelligence sociale pour faire parler vos interlocuteurs
Jennifer donne également des cours en Ecole de Commerce, sur l’intelligence sociale, afin d’expliquer aux futurs commerciaux comment s’adapter aux autres.
“En télémarketing”, nous dit-elle, “l’intelligence sociale est très utile : si quelqu’un est pressé, on va lui parler mais en tenant compte qu’on doit se dépêcher ; si quelqu’un est sur la retenue on va essayer de briser un peu la glace. C’est tout simplement de la relation humaine” souligne-t-elle.

La prospection téléphonique, c’est du marketing relationnel et de la communication avant d’être de la vente, pour s’adapter à l’autre et à sa manière de réagir
N’allez pas croire cependant que nous sommes dans le monde des bisounours, la prospection téléphonique est compliquée, souligne-t-elle. On ne prend pas des rendez-vous et on n’obtient pas des informations toujours aussi facilement, mais à partir du moment où vous tirez le fil, les gens sont partants pour vous raconter leurs problématiques.
Tout dépend de la manière dont vous les approchez. C’est là que le doigté va être important entre le script et la conversation. Le script est là pour le pense-bête, mais l’interlocuteur ne doit pas s’en apercevoir.
En conclusion, quelques règles simples peuvent vous éviter de vous épuiser en essayant de prendre des rendez-vous lors de vos sessions de prospection BtoB. Hélas, les choses simples sont aussi les plus compliquées à mettre en œuvre et bien que s’intéresser aux autres semble être une injonction facile, elle est au contraire très ardue pour la plupart des commerciaux qui, stressés par leur métier et leurs produits, ont beaucoup de mal à se détacher de leurs propres préoccupations pour s’intéresser à celles des autres. Certainement que la connaissance des autres commence par ce précepte socratique qui consiste à tenter de se connaître soi-même.
(*) Le master de management du développement commercial où enseigne Jennifer a pour objectif de former des commerciaux et des managers commerciaux, des gens de terrain. Cela est important à souligner car c’est là une des rares écoles en France à proposer un master portant sur une formation de terrain pour des gens qui vont réellement vendre en vente complexe. Et comme on le sait, les postes de commerciaux sont nombreux à pourvoir. Maintenant, futures jeunes recrues de la vente, vous savez dans quelle école postuler.